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MOUVEMENT NKUL BETI
   CAMEROUN             AFRIQUE             MONDE
Pr Franklin Nyamsi « Ouattara a rétabli les fondamentaux de la Côte d’Ivoire »
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© Le Patriote : Interview réalisée par Y. sangaré
Titulaire d’un Doctorat en Philosophie de l’université Charles de Gaulle-Lille 3 avec la mention très honorable, Pr Franklin Nyamsi est également un politologue et un observateur très averti de la scène politique ivoirienne. De passage à Abidjan, l’universitaire, qui vit en France, précisément à Paris, se prononce sur la récente visite du président Hollande, la gouvernance Ouattara, la question de la candidature unique au sein du RHDP et sur la crise au FPI. Il répond sans détours aux questions du Patriote. Entretien à bâtons rompus.
     Date de publication: 24-07-2014   00:21:53
Le Patriote : Quelle lecture faites-vous de la récente visite du président de la République française, SEM François Hollande, en Côte d’Ivoire?

Pr Franklin Nyamsi : Cette visite témoigne d’une chose essentielle, c’est l’excellence des relations qui lient la Côte d’Ivoire à la France. Et ce sont des relations qui datent même de la période de l’aube des indépendances. Le président Hollande est venu confirmer que l’esprit qui a présidé à la prise en main de ce pays par le président Houphouët-Boigny est absolument renouvelé et fructifié par le président Alassane Ouattara qui, en quelque sorte, a une triple compétence. D’abord, il a cette compétence fondamentale qui est celle de la légitimité démocratique. Le président Hollande, en venant ici, vient affirmer à la face du monde entier que la légitimité démocratique du président Alassane Ouattara ne fait l’ombre d’aucun doute pour la droite, la gauche, l’extrême gauche ou l’extrême droite française. C’est un signe très fort. En Afrique francophone, il n’y a pas beaucoup de pays qui bénéficieront de ce regard particulier du président de la République française. Deuxième légitimité, la légitimité économique. Le président Hollande est venu très clairement défendre, avec une certaine humilité qu’il faut saluer, les intérêts des entreprises françaises en Côte d’Ivoire. On parle de 700 à 800 entreprises françaises en Côte d’Ivoire, qui produisent 200 000 emplois et qui ont vocation à aider la France elle-même à lutter contre le fléau du chômage qui, pour nous qui vivons et qui sommes aussi des citoyens français d’adoption, est un fléau terrible avec une croissance française qui se maintient cette année encore à pratiquement moins de 1 % alors que la Côte d’Ivoire est à plus de 9 % de croissance. Donc le président Hollande vient littéralement saluer l’expertise du président Alassane Ouattara dont la politique, depuis trois ans, a rétabli l’infrastructure économique ivoirienne et la confiance des institutions financières envers l’économie de Côte d’Ivoire. Vous l’avez vu avec la note de Moody’s qui fait pâlir d’envie de nombreux Etats occidentaux. Le président Ouattara a été présenté par le président François Hollande comme une expert respecté sur toutes les grandes places économiques du monde. Et cette visite de Hollande avec 50 chefs d’entreprises françaises est la reconnaissance de cette capacité. Il faut d’ailleurs dire que le président Ouattara, sur ce point-là, a la reconnaissance même de son opposition la plus radicale. L’ancien président ayant lui-même reconnu dans une interview célèbre de «Jeune Afrique» qu’Alassane Ouattara est un très grand travailleur. Je crois qu’on le voit. Evidemment, il faut que tout cela se traduise plus sérieusement par une politique sociale. Le président Ouattara a redressé l’architecture de l’économie ivoirienne. Je pense qu’il est parfaitement conscient du fait que le social est encore à la traîne. Le panier de la ménagère, la capacité de se soigner des habitants, la protection des uns et des autres contre la vulnérabilité de l’urbanisme (on l’a vu avec les inondations), la vulnérabilité sanitaire, la jeunesse qui est en quête d’emploi… Il y a encore du travail à faire. Mais ce premier mandat du président Alassane Ouattara a véritablement déjà eu un succès inéluctable. Il a rétabli les fondamentaux de l’économie ivoirienne. Il a posé la macroéconomie ivoirienne sur ses fonts baptismaux. Et tous ceux qui observent avec un certain détachement doivent le reconnaître. Troisième légitimité de cette visite apportée par le président Hollande, c’est ce qu’on peut appeler une légitimité symbolique. Dans le cadre du processus de réconciliation en œuvre en Côte d’Ivoire, que n’a-t-on pas entendu avant que le président Hollande n’arrive ? Apparemment, l’opposition radicale du Front populaire ivoirien qui est une opposition extra parlementaire, prétendait que cette visite venait légitimer en quelque sorte l’ancien président de la République Laurent Gbagbo, prisonnier aujourd’hui à la Haye. On a entendu que cette visite serait un camouflet au régime du président Alassane Ouattara. Mais qu’est-ce qu’on a vu ? Ce qu’on voit, c’est un président Hollande reconnaissant les progrès substantiels faits par le régime démocratique du président Ouattara dans le domaine de la réconciliation nationale. Reconnaissons qu’il n’est pas facile de partir de -5 % de croissance à près de 9 % voire plus, de reconstituer une justice entièrement détruite par l’ancien régime avec une situation où il y a à peine 600 juges pour l’ensemble d’un territoire de plus de 20 millions d’habitants. Le président Hollande reconnait qu’Alassane Ouattara est véritablement et sincèrement engagé pour la réconciliation des Ivoiriens. Le président Hollande est forcément au courant du débat qui a eu lieu au sujet de la Commission électorale indépendante et s’il n’a pas donné crédit aux accusations fallacieuses de l’opposition radicale, c’est bien parce qu’on sait que le Front populaire ivoirien a peur des élections. Et c’est parce qu’il a peur, qu’il ne veut pas siéger à la CEI. Parce qu’en général, quand il est à la Commission électorale indépendante, il déchire les résultats qui ne lui plaisent pas. Tout le monde connait cette image symbolique de Damana Pickass déchirant les résultats qui ne lui plaisaient pas. Donc le Front populaire ivoirien ne possédant plus de chars pour encercler la CEI lorsqu’elle proclamera les résultats, sachant qu’il perdra d’office les consultations qui s’annoncent, préfère faire la politique de la chaise vide et de la terre brûlée. C’est une politique qui ne mène à rien. Sur ce point, le président Hollande a été catégorique. Si on veut exercer le pouvoir d’Etat, il faut aller aux élections et prendre le risque de gagner ou de perdre. Le président Alassane Ouattara n’incarne pas le principe monomaniaque qui dit : «on gagne ou on gagne». Il veut véritablement affronter pacifiquement l’opposition dans une concurrence bien organisée. Et cette visite vient consacrer cela. Donc je dirais que la visite du président Hollande à Abidjan est la visite des trois légitimités : légitimité économique, légitimité politique et légitimité symbolique. C’est la reconnaissance qu’il y a quelque chose de grand en marche dans ce pays.

LP : Sur les réseaux sociaux, les détracteurs du président Ouattara avancent que cette visite renforce le tutorat de la France sur la Côte d’Ivoire. Qu’en pensez-vous ?

Pr. FN : Ma réponse est la suivante : le président Alassane Ouattara a été légalement et légitimement élu par les Ivoiriens pour représenter leurs intérêts au plus haut point ici comme ailleurs. Avant d’être élu par les Ivoiriens, le président Ouattara a décliné un programme. Celui des «ADO Solutions » et du «vivre ensemble » que tout le monde connait. Dans ce programme, le président Alassane Ouattara a clairement dit aux Ivoiriens quels seraient les partenaires de la Côte d’Ivoire. Et il a cité en premier rang la France. Donc les Ivoiriens, dans leur majorité, ont confié au président Ouattara la négociation de leurs intérêts avec le reste du monde. On ne peut donc pas dire qu’il trahit alors qu’il met en œuvre le programme annoncé sans cachoterie à ses électeurs potentiels. Deuxième argument très important, la Côte d’Ivoire est le pays qui a une longue tradition de coopération avec la France, quel que soit le bord politique qui gouverne. Donc pour moi, c’est un faux débat. Alassane Ouattara est le président légitime et légal des Ivoiriens, élu sur la base d’un programme qu’il leur a présenté d’avance et dans lequel le partenariat avec la France était clairement montré comme un axe privilégié. Dans son programme, la coopération bilatérale franco-ivoirienne a été clairement présentée aux Ivoiriens. Et il la met en œuvre. Pour moi, il n’y a donc aucune espèce de contradiction. Il est important de voir que la nature des relations entre la France et les pays africains a changé. Vous pouvez lire par exemple l’accord de partenariat de défense qui a été signé cette fois-ci et le comparer aux anciens accords de défense franco-ivoiriens. Vous verrez que c’est fini le paternalisme. Le président Alassane Ouattara et l’élite bureaucratique ivoirienne ont été formés dans les mêmes écoles que les dirigeants français. Il y a des dirigeants ivoiriens qui sont mieux formés que des ministres français et qui pourraient même être de bien meilleurs conseillers pour des politiques français aujourd’hui. Il n’y a plus de complexe. Nous sortons des mêmes moules de formation internationale. Nous n’avons vraiment pas de complexe d’infériorité devant ceux qui sont Français ou Occidentaux dans ce domaine-là. Par conséquent, il faut avertir deux camps. Le premier, ce sont ceux qui ont observé les reflexes paternalistes provenant du colonialisme. Malheureusement, il y a des gens qui peuvent être des entrepreneurs français, des hommes politiques français et même des citoyens français ordinaires qui auraient en arrière pensée l’idée d’une certaine supériorité de l’homme blanc sur l’Africain. Il faut qu’ils se méfient. En Côte d’Ivoire, cela ne va plus être possible. Et l’ouverture du marché ivoirien sera déterminée par le critère de la compétence. Les deux présidents l’ont affirmé. Il faut que les reflexes coloniaux soient progressivement du passé, à la fois chez les ex-colonisés que nous ne sommes pas parce que nous n’avons pas connu la colonisation pour la plupart dans l’Afrique contemporaine et chez les ex-colonisateurs que les dirigeants actuels français ne sont plus. Ils n’ont pas aussi vécu le moment colonial. Et les anticolonialistes dogmatiques de tous les camps ne peuvent, à mon avis, prospérer en Côte d’Ivoire. Ce qui va prospérer dans ce pays, c’est l’efficacité, la compétence. Celui qui n’est pas efficace et compétent ira probablement se faire voir ailleurs.

LP : Le président Hollande a aussi indiqué que la Côte d’Ivoire a profondément changé sous Ouattara. Partagez-vous cet avis ? Si oui, comment appréhendez-vous ce changement ?

Pr FN : Effectivement, je partage largement cet avis mais pour des raisons qui sont peut-être encore plus variées que celles que le président Hollande a avancées. On peut prendre comme premier critère, l’image médiatique de la Côte d’Ivoire. Elle est double. Il y a une image médiatique interne et une image médiatique externe. L’image interne c’est de regarder ce qui se passe dans les médias ivoiriens. Est-ce que la presse ivoirienne s’exprime librement ? Oui. On n’a jamais vu fleurir aussi bien la presse bleue, y compris en calomnie, en médisance, en insulte, etc. Est-ce que les médias publics ivoiriens, notamment la télé et la radio, relaient la haine qu’on a connue pendant les 10 ans du régime Gbagbo ? Non. Celui qui écoute la radio publique ivoirienne, qui regarde les chaînes de télé de la RTI constate que ceux qui ont la responsabilité de la communication politique en Côte d’Ivoire ne contractent plus cette maladie terrible qui est l’envie de tuer quelqu’un. Pendant les 10 ans du régime Gbagbo, les médias publics ont été transformés en officine d’intoxication, d’incitation au meurtre, au crime. Voilà comment des journalistes ont été assassinés dans ce pays. Jean Hélène, Guy André Kiffer et bien d’autres ont disparu parce que les médias publics ivoiriens, sous le régime Gbagbo, incitaient leurs partisans au meurtre. Donc on peut prendre ce premier critère comme l’image interne. Maintenant regardons l’image externe de la Côte d’Ivoire. De ce point de vue, le pays a retrouvé sa place dans toutes les institutions internationales d’où elle avait été exclue. L’Assemblée nationale ivoirienne a été promue au cœur de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie au point que Guillaume Soro, président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire, est le vice-président de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF). La Côte d’Ivoire a repris sa place dans toutes les organisations financières internationales. Elle a pleinement repris sa place dans l’organisation des Nations Unies et dans l’Union africaine. Elle a même présidé la CEDEAO. Il n’y a pas de doute que l’image externe de la Côte d’Ivoire est réhabilitée. Cela dit, il y a quand même un deuxième critère. C’est de regarder les réalisations en cours dans le pays. Il faut être aveugle, pas seulement des yeux mais aussi du cœur, pour ne pas voir ce qui change dans l’espace ivoirien. Le pont Henri Konan Bédié n’est pas une fiction, tout le monde peut voir qu’il est en voie d’achèvement. Les travaux de la gare internationale à Abobo ne sont pas une fiction. L’autoroute du nord merveilleusement prolongée jusqu’à Yamoussoukro et bientôt à Bouaké n’est également pas une fiction. La restructuration de l’hydraulique villageoise n’est pas une fiction. L’effort du gouvernement de doter les centres hospitaliers universitaires (CHU) de moyens modernes n’est pas une fiction. Et le fait que la Côte d’Ivoire puisse aujourd’hui emprunter de l’argent dans le marché financier international à des taux extraordinairement bas n’est pas une fiction. La Côte d’Ivoire économiquement est en mouvement. Mais tout n’est pas parfait. Nous n’allons pas tomber dans la vulgarité de l’ancien régime qui consistait à se présenter comme la sainteté incarnée et à présenter les autres comme le diable. La réalité est que les pratiques qui ont retardé la Côte d’Ivoire ne peuvent pas disparaître le temps d’un seul mandat présidentiel. C’est pour cela que l’action que le président Ouattara a engagée à la tête de la Côte d’Ivoire doit s’approfondir. Et tous ceux qui aiment vraiment ce pays, à mon avis, se rangeront à l’avis objectif selon lequel le président Ouattara doit poursuivre, par un deuxième mandat, l’œuvre de refondation réelle qu’il a entreprise.

LP : Toute l’embellie économique que vous venez de décrire n’est pas encore perceptible dans l’assiette des Ivoiriens. N’avez-vous pas le sentiment que le président Ouattara a privilégié les grands chantiers au détriment des questions sociales ?

Pr. FN : Le président Ouattara a procédé comme un architecte. On ne peut pas bâtir une maison sans lui donner des fondations solides. C’est l’image que je retiendrai. Ce premier mandat est celui des fondations. Le président Ouattara pose les grands ensembles. Le second mandat va être celui, si vous voulez, de la décoration. Ce sera le mandat de l’embellissement, du parachèvement. Et ce mandat-là doit se manifester dans le panier de la ménagère. Je veux dire en tant qu’observateur politique de la Côte d’Ivoire, le second mandat d’Alassane Ouattara sera un mandat social. Et ce virage social sera d’autant plus aisé que les fondamentaux auront été posés. Ce qu’il faut, c’est davantage de pédagogie envers les populations, pour leur dire qu’on ne change pas l’économie en donnant de l’argent aux gens pour qu’ils aillent manger. Ce n’est pas cela, changer l’économie. On change l’économie en donnant de l’argent aux gens pour qu’ils soient capables de se nourrir par eux-mêmes, c’est-à-dire de produire. Donc on change l’économie en améliorant les conditions de production, les infrastructures. Cela étant dit, ceux qui ont faim, ceux qui ont soif ou ceux qui sont malades ne peuvent pas attendre. La vie humaine ne peut pas être constamment projetée dans le futur. C’est pour cela que, dans l’urgence, le gouvernement doit, dans la perspective du second mandat du président Ouattara, insister davantage sur l’emploi des jeunes. Je pense par exemple que les microcrédits accordés aux jeunes pour entreprendre dans le domaine agricole et le petit commerce doivent être expérimentés en Côte d’Ivoire. Il faut faire confiance aux jeunes. Il faut que les banques prêtent. Je pense que c’est un phénomène francophone extrêmement massif. Les banques francophones ne prêtent pas assez. Les Ivoiriens et les Africains en général ont le sentiment que les banques, qui sont d’ailleurs en très grande partie françaises, ne prêtent pas assez aux natifs africains. Il faut que cela cesse. Pourquoi faut-il que les entreprises françaises en Côte d’Ivoire, au Cameroun ou au Sénégal obtiennent plus facilement les crédits pour agir dans nos économies que les entreprises africaines, ivoiriennes, camerounaises, sénégalaises ? Je pense que le président Ouattara qui est un expert en la matière doit absolument déclencher le climat social. Il faut prêter aux jeunes entrepreneurs africains. Il faut leur faire confiance. Il faudrait qu’à la fin de ce premier mandat que la majorité des jeunes Ivoiriens, capables d’entreprendre, disent que « le président Ouattara m’a donné ma chance au moins une fois ». Et qu’est-ce que c’est que donner sa chance à un jeune entrepreneur ? C’est lui prêter de l’argent pour mettre en œuvre un projet dont on a mesuré la faisabilité. Sur ce point-là, je suis resté sur ma soif. Je suis au contact de cette jeunesse comme professeur et chroniqueur politique et je sais qu’elle a besoin qu’on lui fasse confiance. Président, prêtez de l’argent aux jeunes entrepreneurs ivoiriens pour qu’ils créent les emplois que vous leur avez promis, qu’ils s’auto emploient et qu’ils agissent. Il y a un deuxième axe dans lequel les choses doivent se faire. C’est l’ouverture de la Fonction publique à la diversité des compétences acquises par les jeunes Ivoiriens. Il faut une politique plus volontariste de l’emploi, dans les grandes administrations régaliennes de la Côte d’Ivoire à partir de l’agriculture jusqu’à la diplomatie en faveur des jeunes. Je crois que ce sont eux qui vont faire l’élection de 2015 et toutes les élections qui viendront, puisque près de 60 à 70 % de la population ivoirienne a moins de 40 ans. Attention, ces jeunes ne vont plus voter dans le cadre des consignes des grands dirigeants ethno-politiques. Ça ne va plus se passer comme ça. On a vu le phénomène des indépendants lors des élections locales. Qu’est ce que cela a-t-il démontré ? Quand les Ivoiriens savent que leur bulletin de vote compte, ils choisissent celui qui les arrange. Ils ne choisissent plus celui qui porte simplement le même nom qu’eux. Mais le candidat qui est susceptible d’apporter quelque chose dans leur assiette, d’apporter un changement dans leur vie. Or à partir de 2015, la confiance que le président Ouattara a mobilisée pour élever le niveau d’objectivité des institutions politiques ivoiriennes va se traduire par la capacité des Ivoiriens de choisir qui ils veulent. On a vu des candidats traditionnels du RDR et du PDCI mordre la poussière face à des indépendants parce que les électeurs savent que leur urne dit la vérité qu’ils ont voulu y mettre. Voilà un peu comment j’analyse cela.

LP : Le président Ouattara fait face à une grogne des militants du RDR, qui estiment n’avoir pas encore bénéficié des fruits de la lutte et de façon générale des Ivoiriens qui se plaignent de la cherté de la vie. N’est-ce pas une tache noire de son premier mandat ?

Pr FN : Pour moi, il y a plusieurs choses. Les électeurs déplorent au moins trois choses. La première, c’est que ceux avec qui ils se sont battus pour un changement de majorité politique semblent, par certaines attitudes, se couper de ce peuple qui a souffert avec eux. C’est une grogne qu’on peut entendre même au cœur du parti au pouvoir. Il y a des militants du RDR qui sont déçus. Le président Alassane Ouattara le sait. Certains estiment qu’ils ont donné de leur vie, de leur sang, de leur sueur pour être traités aujourd’hui comme des moins que rien. Parfois ils ont le sentiment qu’on s’intéresse plus à ceux qui ont détruit le pays pendant 10 ans qu’à eux. Attention, il y a une souffrance des victimes dans ce pays, qu’il ne faut pas négliger. Et ces victimes vont s’exprimer dans les urnes. Deuxième problème, celui de la corruption. Qui est assez fou pour dire que la corruption a totalement disparu de la Côte d’Ivoire ? Sortons de la langue de bois pour reconnaître qu’il y a encore des pratiques de corruption et que la capacité que l’Etat a de contraindre ceux qui ont du pouvoir à respecter les standards de bonne gouvernance, est contestée çà et là par des individus qui ont conservé leur reflexe de prédation. Il faut des sanctions contre ceux qui sont corrompus. Il ne faut pas donner l’impression qu’on les met dans des garages, en attendant qu’on les oublie et qu’on les recycle. Il faut sanctionner les corrompus pour que les militants et les citoyens qui soutiennent la majorité aient confiance en elle. Pour moi, ce deuxième sujet est un axe important. Enfin, troisième chose, il faut poursuivre la politique d’intégration que le président Félix Houphouët-Boigny avait engagé dans ce pays. Il ne faut pas avoir honte de dire aux Ivoiriens venus de l’immigration sous-régionale qu’ils sont les égaux de leurs compatriotes dits natifs de Côte d’Ivoire. La Côte d’Ivoire, c’est un territoire qui date de 1893. Il n’y a donc pas de multi séculaires ici. Les Ivoiriens issus de l’immigration sous-régionale doivent remplir les conditions de citoyenneté auquel ils ont droit et participer pleinement à la vie de leur pays. Il faut, à mon avis, que la majorité actuelle cesse de se comporter littéralement comme si elle était un peu honteuse, de cette situation et comme si elle nourrissait un complexe vis-à-vis du discours du FPI. Il faut casser la grammaire de l’ivoirité en affirmant la suprématie du droit républicain sur les fibres ethniques, xénophobes, chauvinistes, etc. Les Ivoiriens issus de l’immigration burkinabé sont des Ivoiriens. Ceux qui sont issus de l’immigration malienne sont également des Ivoiriens. Les Ivoiriens issus de l’immigration française sont aussi des Ivoiriens. Tout Ivoirien de droit est Ivoirien. Le gouvernement doit affirmer cela sans le moindre complexe et sans craindre qu’on l’accuse de brader la nationalité ivoirienne. De toute façon, il y a d’autres nationalités qui rapportent plus que la nationalité ivoirienne. Il y a des Ivoiriens qui arrivent en France et en deux ans, ils sont Français. Moi, Camerounais d’origine, Ivoirien d’adoption par le mariage depuis 15 ans, j’ai été naturalisé Français au bout de 6 mois de séjour en France dans les années 2000. Comment la France, un pays de structure démographique blanche, catholique peut intégrer des Africains comme moi en 6 mois alors que la Côte d’Ivoire qui accueille sur son sol des immigrés de 40 ans, prétend que ce sont des envahisseurs ? Je pense que le gouvernement et le RHDP doivent assumer son idéologie cosmopolite anti ivoiritaire et qu’il faut cesser de se cacher derrière son petit doigt. Tous les Ivoiriens dès qu’ils remplissent les conditions de droit d’appartenance à la citoyenneté se valent. Et c’est le sens de la lutte que le président Ouattara a menée et personne ne doit rougir de honte quand il faut affirmer ces principes.

LP : Mais il y a déjà le processus de naturalisation par déclaration…

Pr. FN : C’est vrai, mais ça traîne parce qu’on n’en parle pas beaucoup et on ne se force pas d’aller vers les populations. Il y a une partie des populations qui n’ont pas accès facilement aux grands médias. Comprendre ce qu’on dit à la télévision, comprendre ce qu’on dit à la radio, comprendre ce qui est dit dans les journaux, ce n’est pas tout à fait facile. Il faut aller à mon avis vers cette population-là, un peu comme ce qu’on fait pour les recensements. Il faut aller davantage vers cette population les inciter à ne pas avoir honte de demander à être reconnue par la patrie.

LP : Vous évoquiez tantôt la déception des militants du RDR. Pensez-vous que cela peut jouer un mauvais tour au président Ouattara en 2015 ?

Pr. FN : Je pense que la déception des militants du RDR ne jouera pas de tour au président Ouattara, parce que globalement les militants du RDR savent que le président Ouattara est leur fétiche. Quelle est l’analyse que je fais ? Il y a un lien affectif entre l’électorat du RDR et le président Ouattara qui n’est pas le lien que cet électorat a envers tous les collaborateurs du président Ouattara. Voilà la nuance qu’il faut bien saisir. En réalité, je pense qu’ils maintiennent parfaitement leur fidélité à celui qui incarne l’émergence de leur combat, mais que n’ayant pas tout à fait confiance en un certain nombre de cadres avec lesquels ils sont en porte-à-faux, l’abstention au moins peut être un facteur d’inquiétude à l’élection 2015. Il y a des gens qui n’oseront pas aller voter contre le président Ouattara mais qui seraient capables de ne pas aller voter. Parce qu’ils vont dire pendant 5 ans, on s’est foutu de nous, qu’ils se débrouillent. Au moins, on ne dira pas que c’est par ma faute qu’ils n’ont pas eu le chiffre qu’ils voulaient. Donc, ce n’est pas un électorat captif. Le RDR ne possède pas d’un électorat captif. D’ailleurs être membre du RDR, je pense comme de tout autre parti politique, ce n’est pas un groupe sanguin. La preuve, il y a des transfuges en permanence. On a vu des gens du RDR devenus FPI, du FPI devenus RDR, du RDR devenus PDCI, etc. Donc je pense très sérieusement qu’il reste un peu plus d’un an à ce parti de gouvernement qu’est le RDR pour continuer son renouvellement, sa mue et aller vers toutes les populations ivoiriennes et en particulier son propre socle électoral, qui est très rare. Le gouvernement doit aller avec des politiques sociales vers cette population. Il faut du travail pour les jeunes, il faut l’accès aux soins de santé pour la population, il faut qu’évidemment les standards de justice, de sécurité continuent de s’améliorer comme on le voit. Il faut que l’électorat traditionnel du président Ouattara sente que sa vie et la vie de tous les Ivoiriens avec lui a véritablement changé. Et je pense que dans un cadre pédagogique, le président pourra leur expliquer les difficultés de mise en œuvre d’une politique de changement en leur disant : «il fallait que je pose d’abord les fondations et maintenant, je vais procéder à l’ornement, à la décoration, à la construction de l’intérieur de chacun d’entre vous ». Ce n’est pas facile. La Côte d’Ivoire est un pays qui va vers l’émergence. Ce n’est pas un pays qui dispose de ressources illimitées. Voilà les choses qu’il faut expliquer aux militants.

LP : Mais ces militants n’ont pas aussi compris le président Ouattara sur certaines décisions, comme par exemple la libération des pro-Gbagbo, surtout des responsables du FPI, après tout ce qui s’est passé. Est-ce que vous comprenez leur déception ?

Pr. FN : Oui, je comprends à la fois la déception des militants du RDR sur cette question et l’attitude du président Alassane Ouattara. Parce que le président Alassane Ouattara n’est plus simplement le président du RDR. Il est le président de tous les Ivoiriens. En tant que chef, la tradition dit qu’il doit avoir le ventre profond. C’est-à-dire que dans toutes les décisions qu’il prend, il doit tenir compte du fait qu’il est garant de la paix, de la stabilité, de la sécurité pas seulement des militants du RDR mais aussi de ceux du FPI et enfin de tous ceux qui ne sont pas politisés dans ce pays mais qui y vivent. Parce qu’il faut quand même savoir que le gros de la population ivoirienne n’appartient pas à un parti politique. L’appartenance à un parti politique, c’est que les gens paient une carte de membre. Vous savez bien que ce n’est pas par millions qu’un parti politique ivoirien peut revendiquer les membres au sens juridique du terme. Donc le président Ouattara, qui est responsable et garant de la stabilité de l’Etat de Côte d’Ivoire, est obligé à la fois de prendre des mesures pour que l’impunité cesse et pour que la paix, la sécurité et la réconciliation se renforcent. Je crois qu’il faut expliquer aux militants de tous les camps, la difficulté de l’art présidentiel qui est l’art de rassembler ce qui est épars, ce qui est dispersé. C’est l’art de gérer les contradictions. Et quand on se place de ce point de vue, on mesure la chance que la Côte d’Ivoire a d’avoir à sa tête un homme modéré, un homme de dialogue, un homme qui parle finalement peu, mais qui ne parle que pour parler utile. Un homme qui ne veut pas se venger, qui par conséquent a donné l’ordre à toutes ses équipes de trouver toujours à chaque fois la solution la plus juste pour que la Côte d’Ivoire poursuive sa vie dans l’apaisement.

LP : Mais sous Ouattara, la réconciliation ne semble pas encore atteindre sa vitesse de croisière. Qu’est-ce qui explique cela selon vous ?

Pr. FN : La réconciliation ne se fait pas en 5 ans, surtout dans un pays où il y a eu au moins 3000 morts dans une crise postélectorale. Et dans une crise plus longue, on monte pratiquement à 10 ou 15 mille morts. Nulle part dans le monde, on n’a achevé en 5 ans un processus de réconciliation. Prenez le Rwanda, la Serbie, Israël et la Palestine, quel que soit le conflit fratricide que vous analysez à travers le monde, la réconciliation est un processus long. Mais le président Ouattara l’a engagé. Pour passer de moins 5 % de croissance à 9 % de croissance économique dans un pays qui a failli perdre même son unité territoriale, il faut saluer cela. Le Président Hollande a eu raison de saluer les progrès que la Côte d’Ivoire a accomplis. Si on regarde les choses sur la perspective du long terme, le processus de réconciliation en Côte d’Ivoire est en très bonne voie. La paix et la sécurité s’améliorent tous les jours. Les investissements économiques ont repris. La justice commence à sanctionner. Les gens ne font pas attention. Les prisons de Côte d’ivoire ont des hommes et des femmes de tous les camps politiques de Côte d’Ivoire. Le président Ouattara a eu raison d’insister sur le fait que des FRCI qui commettent des exactions sont arrêtés et jugés régulièrement sans pour autant que le gouvernement éprouve pour cela la nécessité de faire la propagande inutile. Nous ne sommes quand même plus sous le régime de la refondation où le moindre acte régalien et ordinaire du gouvernement était exhibé comme l’invention de la poudre. Il y a des soldats FRCI reconnus très proches de la majorité actuellement au pouvoir, qui ont été régulièrement condamnés dans les tribunaux ivoiriens depuis 2011 pour des exactions qu’ils ont commises. Il y a une commission d’enquête qui a rendu son rapport, des juges qui se saisissent des dossiers et travaillent sérieusement.

LP : Mais pour une certaine opinion, c’est une justice des vainqueurs…

Pr. FN : Cette expression est un oxymoron qui, en stylistique est une figure de style dans laquelle deux mots sont associés et qui sont le contraire l’un de l’autre. Un peu comme on pourrait dire une glace chaude. Si c’est de la justice, ce ne sont pas les vainqueurs qui la font, c’est l’égalité qui la fait. Si ce sont les vainqueurs, ce n’est plus de la justice, c’est de la domination. Si l’ex-président Gbagbo et Blé Goudé sont aujourd’hui à la Haye, c’est à cause justement de cette propagande dite de la justice des vainqueurs. Pour échapper à l’accusation de partialité, d’iniquité et d’égalité, la Côte d’Ivoire s’en est remis aux institutions internationales pour que personne ne dise que c’est tel qui a condamné ces acteurs majeurs de la crise postélectorale. De mon point de vue, soit il y a justice, soit il y a vainqueur. Mais il n’y a pas justice de vainqueurs. C’est un peu comme si on dirait un soleil ténébreux, le soleil ne peut pas projeter les ténèbres. C’est le soleil qui permet que nous voyons les ténèbres, ce n’est pas lui qui les projette. Très sérieusement, il faut faire confiance à la réorganisation de la justice ivoirienne. Elle ne parle pas trop, mais elle a agi. C’est une justice qui a beaucoup de travaux. Je voudrais vraiment rendre un vibrant hommage à ces magistrats qui ont des piles de dossiers tous les jours sur leur table en Côte d’Ivoire, qui doivent trancher pour que la paix, la sécurité et la cohésion se poursuivent. Et qui malheureusement ne sont pas suffisamment reconnus par la population elle-même comme étant la condition de leur paix. C’est en leur âme et conscience qu’ils ont jugé, que certains responsables de la crise postélectorale ivoirienne en étant provisoirement libérés, contribueraient d’une manière ou d’une autre à renforcer la confiance dans l’Etat de Côte d’Ivoire. La réconciliation est une œuvre de long cours. Ce qui compte, c’est la volonté politique d’y aller. Le président Hollande l’a dit, il n’y a pratiquement pas de doute, Alassane Ouattara n’est pas un vengeur. S’il l’était, Affi N’Guessan ne se promènerait pas dans toute la Côte d’Ivoire. Lui qui a dit : ‘’où Alassane Ouattara passera-t-il pour arriver au palais présidentiel ?’’. Lui qui a dit :’’c’est sur notre corps qu’il passera pour arriver au palais présidentiel’’. Cet homme-là, ancien Premier ministre qui a eu le courage de faire des pompes alors que sa vie n’était pas menacée, parce qu’on l’en avait contraint pour l’e ntretien de sa forme physique. Ce grand lâche qui tient toujours ce discours offensif légèrement en victimaire, bénéficie de la protection magnanime du Président Alassane Ouattara, en guise de message à ceux qui sont moins radicaux que lui et qui restent à l’extérieur. En France, j’ai vu M. Abel Naki qui court à travers toute la diaspora avec des hordes de marcheurs qui veulent libérer M. Gbagbo de la Haye. Mais il n’est pas plus radical qu’Affi N’Guessan, qui circule librement en Côte d’Ivoire. Ou encore le comité directeur du FPI avec Laurent Akoun qui multiplie les déclarations incendiaires à la première occasion. Mais le président Ouattara reconnait que tous ces gens-là doivent s’exprimer librement. Mais pourquoi ? Par son éducation, il a habitué à ce qu’il y ait des désaccords. Et les désaccords ne l’empêchent pas de dormir. Au contraire, c’est la preuve que son peuple est vivant. Je crois qu’un grand chef, c’est ça. Il laisse parler les gens, et il décide et il oriente. Pour le reste, la vie continue.

L.P : En 2015, le président Ouattara l’a annoncé, il sera candidat à sa propre succession. Croyez-vous à une candidature unique au sein du RHDP ?

Pr FN : J’ai une théorie très complexe sur cette affaire. Je veux bien vous l’exposer. Je pense que le président Henri Konan Bédié, président du RHDP, donc président du PDCI-RDA, soutiendra la candidature du président Alassane Ouattara. Je n’ai aucune espèce de certitude que ce sera le cas de toutes les factions qu’il y a dans le RHDP, en particulier dans le PDCI-RDA. Vous avez vu la déclaration des 29 députés (qui s’opposaient à la mouture de la nouvelle CEI, ndlr), vous avez entendu le petit rififi qu’il y a de temps en temps dans l’air au sein de la majorité à chaque fois, de la part d’une minorité à l’intérieur du PDCI. Il n’est pas exclu qu’un candidat renégat du PDCI-RDA se présente en indépendant contre le président Alassane Ouattara. Voilà un premier facteur qu’il faut prendre en compte. La politique est l’appréciation saine des réalités. Deuxième situation, le FPI est manifestement dans un processus schismatique. Il y a Laurent Gbagbo qui, depuis sa cellule de La Haye, à travers Laurent Akoun, dirige le parti et la fronde contre Affi N’guessan. Ceux-là ne veulent pas d’une candidature du FPI à la présidentielle de 2015 tant que M. Gbagbo ne serait pas libéré. Il y a aussi l’aile incarnée par le président du FPI, Pascal Affi N’guessan, qui manifestement est en marche vers l’élaboration d’une candidature de participation à la présidentielle. Donc, il n’est pas exclu que le FPI ait un candidat à la prochaine élection présidentielle. Ce qu’il faut dire, c’est qu’il y aura des candidats indépendants, issus du FPI, du PDCI-RDA ou même parfois issu du RDR. A mon avis, le président Ouattara peut être sûr qu’en 2015, il aura droit à une élection pluraliste. Ce sera une élection ouverte, à rebondissement. Et voilà pourquoi, pour ma part, en tant que compagnon de lutte de la majorité présidentielle aujourd’hui, de quelqu’un qui est un soutien fondamental du président Alassane Ouattara, je parle du président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro, je pense qu’il faut prendre très au sérieux, du point de vue de la préparation, l’élection présidentielle de 2015. Par naturel philosophe, je suis sceptique. Je ne considère que comme gagné, des combats qui ont été livrés effectivement de manière victorieuse. Je pense que le président Alassane Ouattara pourra s’imposer, mais les conditions pour que cette victoire soit une certitude ne sont pas encore réunies. Il faut se mettre au travail. Il y a le volet social de la politique gouvernementale qu’il faut accélérer. Il y a la cohésion dans le RHDP qu’il faut accélérer et puis, il y a le langage de vérité qu’il faut tenir au FPI. Peu importe qui se présente ou ne se présente pas finalement pour le FPI. Il faut qu’il y ait une cohésion. Le RHDP ne peut pas avoir gouverné pendant 5 ans avec le président Ouattara et ensuite se fissurer à l’approche du premier tour de la prochaine présidentielle comme s’il était devenu une opposition supplémentaire. Je pense que dans cette affaire, ceux qui risquent de perdre gros, ce ne sont pas le RDR et le président Ouattara. Ce serait à mon avis le PDCI-RDA. Il faudrait que ce parti se méfie. Il est vraiment menacé de disparition politique s’il ne reste pas dans la cohérence du RHDP. C’est vraiment dans cette coalition politique que le PDCI-RDA a un avenir dans la politique ivoirienne. Et moi je suis pour la renaissance du parti houphouétiste réunifié. Je suis frustré par le fait qu’après 5 ans bientôt, de gouvernement, le PDCI et le RDR n’aient pas réussi à nous offrir cette union houphouétiste qui est la condition pleine de l’émergence ivoirienne.

L.P : Pour d’aucuns, c’est une alliance de dupes…

Pr FN : Je ne pense pas que ce soit une alliance de dupes. Je pense qu’au sommet, il y a deux hommes, qui non seulement se connaissent, se sont par le passé affrontés et qui ont tiré toutes les leçons de leur affrontement pour l’intérêt supérieur de la Côte d’Ivoire. Par contre, le vrai problème, à mon avis, dans le RHDP, c’est que ceux qui ont contribué à théoriser l’idéologie de l’ivoirité dans le régime Bédié entre 1993 et 1999 sont encore vivants et actifs. Ce sont eux qui contribuent à radicaliser une partie du PDCI contre le président Bédié d’une part et d’autre part contre le président Ouattara. Tant que les intellectuels, conseilleurs du président Bédié, qui ont contribué dans les années 90 à formuler l’idéologie politique et exclusif de l’Ivoirité n’ont pas fait leur mea culpa, il restera dans le PDCI, un camp que j’appelle le camp ivoiritaire, ce que j’appelle le PDCI national et je l’oppose au PDCI RDA. Ce PDCI national est susceptible de s’associer avec le candidat du FPI autour du thème : «Nous contre les étrangers, nous contre les métis, nous contre tout qui est venu d’ailleurs ». Vous connaissez cette affaire 100 % ivoirien. La campagne de Gbagbo pourrait recommencer au bénéfice d’un candidat qui serait le candidat de l’union de ce que j’appelle le bloc ivoiritaire multipartite. Il y a dans le PDCI, des ivoiritaires. Le FPI est entièrement constitué d’ivoiritaires et une partie de l’opinion nationale est sensible à la notion de vengeance, de haine. Ils parlent parfois d’ailleurs de match retour. Donc, il faut faire très attention. Il faut qu’au PDCI-RDA, la cure spirituelle, morale et éthique se poursuive au grand jour. Ceux qui ont écrit le concept d’ivoirité dans les années 90 sont là. Ils n’ont pas republié une seule tribune. Depuis des mois, depuis des années, ils n’écrivent rien pour dédire, déconstruire le poison qu’ils ont éjecté dans cette société. Je suis scandalisé que ces gens-là aient de nouveau des postes dans les ministères, soient tranquillement assis pour gouverner avec le président Ouattara sans avoir nettoyé les bibliothèques, les esprits du poison qu’ils avaient instillé. Ceux-là, ils sont connus. Ce sont les intellectuels du Curdiphe. Ils font comme si ce ne sont pas eux qui ont préparé le terrain dans lequel Gbagbo et le FPI sont venus surfer pour produire la mort en quantité industrielle. Donc intellectuel, enfant adoptif de ce pays, nous sommes déterminés à débusquer les penseurs de l’ivoirité quel que soit le camp dans lequel ils se trouvent. La bête dans ce pays, c’est cette idéologie-là. Et cette idéologie qui divise sur un certain nombre de questions le RHDP. Cette idéologie qui divise le FPI. Cette idéologie qui divise l’Afrique. Et cette idéologie qui est la source des grands crimes contre l’humanité à travers le monde.

LP : Vous évoquiez tantôt le schisme au sein du FPI. En tant qu’analyste politique, vous attendiez-vous à cela ?

Pr. FN : Je ne suis pas du tout surpris au fond par le schisme en cours au sein du FPI. Parce que le FPI a été bâti par quelqu’un qui s’appelle Laurent Gbagbo à partir du principe suivant, et il l’a énoncé lui-même : « quand on t’envoie, il faut savoir t’envoyer ». On peut dire que le FPI, c’est le front des opportunistes rassemblés. Ils sont rassemblés par des intérêts immédiats. Il n’y a pas une vision de long terme, hormis celle de jouissance totale, immédiate du pouvoir dans le cadre clanique. Et donc quand les conditions de la jouissance du pouvoir sont perturbées, les intérêts individuels reprennent du poids. Regardez ce parti incapable de se financier publiquement et qui s’adresse aux portefeuilles des Ivoiriens lambda pour se financer alors qu’il a été un parti de pouvoir pendant 10 ans. Regardez ce parti dans lequel les individus se battent pour le déblocage de leur compte bancaire mais ne mène aucune action de solidarité sociale ou populaire vers la population. On connait la fondation Children of Africa de Mme Dominique Ouattara. On connait la Fondation Guillaume Kigbafori Soro. Dites-moi, ces gens-là qui ont exercé le pouvoir pendant 11 ans, comment est-ce qu’ils aident les populations de leurs socles électoraux à affronter la vie au quotidien ? Ce sont des individualistes rassemblés. A partir de ce principe de l’opportunisme et de la mentalité de jouissance, le FPI était destiné à se disloquer. La deuxième raison pour laquelle le FPI est en train de voler en éclats, c’est qu’il a adhéré à une idéologie qui, sur tout le continent africain a connu ses limites. Je l’ai appelé l’anti-colonialisme dogmatique. Elle consiste globalement à dire aux Africains : «détestons ensemble l’Occident quand l’Occident n’arrange pas nos intérêts ». Mais pendant qu’on dit cela aux Africains, on déteste les Africains. Donc le même parti qui a organisé la chasse aux Mossis, la chasse aux Maliens, la chasse aux Guinéens, la chasse aux Ivoiriens du nord qui sont les Africains. Donc le même parti qui a défendu un nationalisme hérité des frontières coloniales est le parti qui a tenté de s’accrocher à l’affirmation suivante : «Gbagbo, c’est notre Um Nyobé, c’est notre Lumumba, c’est notre N’krumah, c’est notre Nyerere, c’est notre Mandela» et il combat l’Occident. Maintenant on le sait, tout cela était du vent. Donc le FPI manque aujourd’hui d’idéologie internationale. Il a été vidé de l’International socialiste. Le FPI devrait adhérer à l’international d’extrême droite avec Madame Marine Le Pen et d’autres leaders connus dans le monde proches des mouvements néo nazi. Le FPI aurait parfaitement sa place là-dedans. C’est la deuxième raison pour laquelle ce parti est voué à son auto démolition. La troisième raison, elle est très importante. M. Gbagbo a dit dans un entretien archivé avec M. Claude Guéant, secrétaire général de l’Elysée et M. Robert Bourgi, entremetteur de ce qu’on a appelé la Francafrique, la chose suivante, lorsqu’il refusait en 2010 de céder le pouvoir que les Ivoiriens lui avaient retiré : «dites à Sarkozy que je serai son Mugabé. Je ne céderai jamais le pouvoir à Alassane Ouattara et je vais noyer la Côte d’Ivoire dans le sang ». Qu’est ce que cela veut dire ? Tout simplement que le FPI est dirigé par un esprit fondamental. Soit Laurent Gbagbo et les siens dirigent la Côte d’Ivoire, soit, dans le cas contraire, la Côte d’Ivoire n’existe plus. Donc voilà un parti politique qui a pour vocation d’exister au détriment de la nation. Si lui, il existe, la nation existe. Mais s’il n’existe pas, la nation cesse d’exister. Ainsi le FPI se présente comme la raison de vivre de la Côte d’Ivoire, alors que la Côte d’Ivoire n’appartient à aucun parti politique. C’est un espace de vie pour tout être humain qui possède précisément en tant qu’être humain, ses dignités de personne et mérite d’être traité avec fraternité, hospitalité, égalité avec humanité.

LP : Pensez-vous que l’aile dure du FPI va prendre le dessus sur l’aile modérée ?

Pr. FN : Au FPI, les choses se règlent progressivement. D’abord par la dialectique grossière, ensuite par les machettes et quand ils en ont la possibilité, ils peuvent passer aux armes lourdes. Je constate que le FPI aura du mal à passer à ces deux dernières phases que j’ai citées. Les extrémistes ne pourront pas l’emporter pour la raison simple et évidente qu’ils ne sont pas capables d’utiliser les armes dans une République démocratiquement et fermement dirigée par le président Alassane Ouattara. Dès qu’ils tenteront de sortir les machettes et les revolvers les uns contre les autres, la loi les ramènera à l’exacte proportion de ce qu’on appelle la discutacio politico-républicaine. Donc je pense que les extrémistes du FPI ne l’emporteront pas. En général, ils l’importent parce qu’à un moment donné, ils ont des machettes et des revolvers, or ils ne pourront pas cette fois-ci avoir des machettes et les revolvers, la loi sera là pour veiller à ce que le débat soit apaisé. Je pense que le président Ouattara est le garant de l’unité du FPI. Voilà le paradoxe dans lequel nous sommes parvenus. C’est le président Ouattara qui protégera le FPI contre lui-même.

LP : Soyez plus explicite

Pr. FN : Il protégera le FPI contre lui-même, parce qu’il empêchera les militants du FPI d’assassiner d’autres militants du FPI. Vous savez qu’au FPI, les désaccords, je le dis encore, se traduisent rapidement comme on l’a vu à l’université quand la FESCI a été instrumentalisée par le FPI. Les désaccords se traduisent rapidement en coups de machettes et ensuite en coups de fusils. Or la République n’appartenant plus aux ministres du FPI, la République n’étant plus sous les ordres d’un certain Laurent Gbagbo, lorsqu’ils voudront passer aux machettes et aux fusils, le président Ouattara sifflera la fin de la récréation au nom du respect de la sécurité, de la paix républicaine. Voilà pourquoi je dis que paradoxalement le FPI sera protégé du FPI par le président Alassane Ouattara. Et je crois que Pascal Affi N’Guessan peut remercier Dieu que Gbagbo ne soit pas là. Parce qu’avec les idées qu’il a, il serait l’une des victimes des escadrons de mort de Gbagbo. Pascal Affi N’Guessan gagnerait à se méfier davantage de ses camarades du FPI que du président Ouattara. Le président Ouattara est le protecteur et le garant des libertés ivoiriennes. Et je trouve que M. Affi N’Guessan ne s’est jamais aussi bien senti comme président du FPI que depuis le président Ouattara est là.
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© Le Patriote : Interview réalisée par Y. sangaré
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