Il ne faut pas faire d’amalgame. Lorsqu’il y avait des salles de cinéma, c’était quand même exceptionnel d’y regarder un film camerounais. C’est vrai qu’en amont, il y avait un problème de production, mais, il faut s’intéresser au modèle économique sur lequel reposait la question des salles de cinéma. Le réseau de salles s’était mis en place sur le modèle colonial, et à une ou deux générations près, était le même jusqu’à il y a quelques années encore. C’est un vieux modèle qui existe dans toute l’Afrique coloniale.
J’ai rencontré un responsable de Universal Studio aux États-Unis, et il m’a fait savoir que le Cameroun ne figurait pas dans leur répertoire de diffusion. Jusqu’ici, personne n’avait semblé remettre en cause ce modèle cinématographique qui nous était imposé. A un certain moment, les exploitants des salles ne respectaient plus les termes des contrats qui les liaient aux autres partenaires, notamment les propriétaires des salles et les sociétés de distribution. Un gérant de salles au Cameroun m’a dit un jour dans un avion, qu’il ne pouvait pas sortir mon film « Quartier Mozart », parce qu’il avait des films américains à la pelle, et qui ne lui coutaient rien. Alors qu’avec moi, il devait se partager les recettes. Pour « Les saignantes », j’avais carrément payé la location de la salle pour sortir mon film. Personnellement, je ne regrette pas la fermeture de l’Abbia, parce que les personnes qui exploitaient cette salle se comportaient comme des voyous. Mais, l’idée de ne pas avoir de salle de cinéma au Cameroun est douloureuse, presque surréaliste. Avec quelques collègues cinéastes, nous avons sérieusement envisagé d’ouvrir une salle de cinéma au Cameroun. Nous avons rencontré Armand Bella, pour restaurer une salle au quartier Omnisports. Nous sommes même allés jusqu’aux études architecturales. Mais au bout du compte, le projet nécessitait un million de dollars. Ce qui n’était pas une petite affaire. Le Fodic qui était sensé mettre en place la politique publique du cinéma a montré ses limites. Ce qui est quand même choquant, c’est de constater qu’il n’y a plus de vision aujourd’hui. Du coup, seule l’initiative privée peut nous sortir de la situation actuelle.Mais, il faut définir un nouveau modèle économique du cinéma chez nous. Le secteur n’est pas organisé. Il n’y a pas de loi qui les protège. Les acteurs sont livrés à eux-mêmes. Il n’y a pas de garantie qui leur soit donnée en contrepartie du risque qu’ils seraient amenés à prendre. Il faut penser à protéger les investisseurs. Il faut les attirer. Il faut aussi que le cinéma se fasse avec des professionnels. Il y a une espèce de nationalisme exacerbé qui fait croire aux gens que nous allons et que nous pouvons développer notre cinéma par nous-mêmes. Il y aujourd’hui des investisseurs qui créent des multiplex en Afrique et ailleurs dans le monde. Un propriétaire aurait de la peine à céder un espace commercial si celui-ci ne lui rapporte pas d’argent. De plus, il faut rapprocher le cinéma des publics. La ville de Yaoundé s’est agrandie. Il n’est plus possible de voir un spectateur partir de Mendong, Olembe ou Nsimeyong venir jusqu’au centre ville pour regarder un film de 21 heures. Enfin, une salle de cinéma n’est qu’un hangar aménagé. Il y a des Camerounais qui peuvent construire une salle de cinéma en place de toutes ces villas qui poussent comme des champignons. Mais, il faut donner des garanties. Et c’est toute l’importance d’un rapport comme celui « « Doing Business », qui classe le Cameroun, très loin dans le rang. Les hommes d’affaires qui veulent investir au Cameroun tiennent compte de ces détails-là. Il y a un dynamisme dans la production, mais toutes les productions ne sont pas destinées à la salle. La télévision, la publicité, et de plus en plus le multimédia sont des créneaux à explorer. Ce qui me fait croire que la disparition des salles de cinéma ne signifie pas la disparition du cinéma camerounais. Ceci dit, un festival sans salle est impensable. Le cinéma en salle a quand même une manière de célébrer le rêve humain. Ne serait-ce que par la taille de l’écran, on parle de grand écran, comparé au petit écran de la télévision, les films programmés au festival méritent d’être projetés sur grand écran.
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